Le décret du président Donald Trump concernant les réfugiés est un acte honteux du gouvernement américain sur plusieurs fronts.
Émis le 27 janvier 2017 et sans préavis, le décret impose une suspension immédiate de quatre mois au programme de réfugiés des États-Unis, interdisant à tous les réfugiés l’entrée aux États-Unis, pour permettre au gouvernement de réévaluer la façon dont les réfugiés sont examinés. En particulier, cela empêche l’entrée de ressortissants syriens en tant que réfugiés, jusqu’à ce que le président Trump détermine que des changements suffisants ont été apportés au Programme d’admission des réfugiés aux États-Unis.
Le décret, intitulé «Protéger la nation contre l’entrée des terroristes étrangers aux États-Unis», coïncide avec l’anniversaire de la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste, établie par l’ONU comme date à laquelle les nations membres honorent la mémoire des victimes de l’Holocauste. La résolution 60/7 commémore le génocide qui a entraîné la mort d’environ 6 millions de juifs, ainsi que d’un autre 500 000 individus, par le régime nazi. L’ordre du président Trump nous ramène au renvoie du SS Saint-Louis, un navire de réfugiés juifs qui se sont vu refuser l’entrée aux États-Unis en 1939, dont beaucoup ont péri plus tard dans l’Holocauste.
Cela empêche effectivement l’entrée d’un grand nombre de réfugiés, y compris ceux arrivés aux aéroports américains, ceux en transit vers les États-Unis ou se préparant à embarquer des vols vers le pays, y compris des réfugiés syriens et des Irakiens qui ont fournis de l’aide aux forces américaines et qui ont déjà été examinés et approuvés par l’administration précédente. Ce sont des réfugiés immigrants, reconnus par les États-Unis, qui fuient des pays déchirés par la guerre et qui détiennent des visas valides pour lesquels ils ont subi des années de dépistage et de traitement approfondis, y compris de multiples vérifications des antécédents à niveau international. Ces personnes pourraient être contraintes de retourner dans des camps de déplacés pendant que le gouvernement réévalue ses politiques indéfinies.
Le décret bloque également l’entrée aux États-Unis, pour 90 jours, de citoyens venant de sept pays majoritairement musulmans: l’Iran, l’Irak, la Libye, la Somalie, le Soudan, la Syrie et le Yémen. Aucun de ces pays n’a eu un citoyen impliqué dans une attaque terroriste sur le sol des États-Unis, ce qui a soulevé des questions sur l’efficacité du décret. Initialement, même ceux ayant des cartes vertes américaines étaient inclus dans l’ordre, cependant l’administration des États-Unis s’est éloignée de cela en raison de la pression croissante. Le décret réduit également de moitié, à 50 000, le nombre de réfugiés admis aux États-Unis pour l’année 2017.
L’interdiction n’aura pas d’incidence sur les citoyens canadiens à double nationalité d’un des pays énumérés. Il faudra des jours avant qu’on sache avec certitude si les résidents permanents canadiens qui voyagent avec un passeport d’un pays énuméré dans le décret sont touchés par celui-ci.
Le gouvernement canadien, ainsi que les dirigeants des gouvernements provinciaux et municipaux, ainsi que les défenseurs des libertés civiles du monde entier, ont exprimé leur indignation devant cette loi controversée. Le premier ministre Justin Trudeau a écrit sur Twitter : « Pour ceux qui fuient la persécution, la terreur et la guerre, les Canadiens vous accueillent, peu importe votre foi. La diversité est notre force #WelcometoCanada ». Trudeau est arrivé au pouvoir en 2015 sur la base d’une promesse électorale qui a abouti au rétablissement de quelque 40 000 réfugiés syriens.
Le décret suit la promesse de la campagne électorale générale du président Trump et a été mis en application sans instruction ni coordination ordonnée entre les agences affectées, forçant les agents frontaliers des États-Unis à lutter avec son application. Un nuage d’incertitude entourant la manière dont l’administration exécutera le décret affectera des milliers de ressortissants à citoyenneté double.
En 2011, le Département d’État des États-Unis a cessé de traiter les demandes des réfugiés irakiens pendant six mois après que le FBI ait découvert des preuves que plusieurs douzaines de terroristes d’Irak avaient infiltré les États-Unis via le programme de réfugiés. À l’heure actuelle, en l’absence d’une menace crédible des réfugiés examinés, et particulièrement ceux de Syrie, de poser un risque immédiat, l’interdiction dans le pays de ceux déjà approuvés par le gouvernement des États-Unis est troublante. Des contestations judiciaires ont déjà été engagées. À Brooklyn, un juge fédéral a publié un arrêt à l’échelle nationale, bloquant une partie des actions du président et empêchant le gouvernement d’expulser certains arrivants qui se sont retrouvés piégés par l’ordre présidentiel. La juge Ann Donnelly a écrit que l’envoi des voyageurs à la maison pourrait leur causer un « préjudice irréparable ». Elle a déclaré que le gouvernement était « enjoint et restreint, de quelque manière et par quelque moyen que ce soit, d’enlever des personnes » qui étaient arrivées aux États-Unis avec un visa ou un statut de réfugié valides.
L’un des jours les plus sombres du Canada est survenu lorsque le pays a poursuivi une politique de « aucun est trop nombreux » en réponse à des millions de réfugiés juifs fuyant l’Allemagne nazie. Mais il ne doit pas rester inactif et fermer les yeux face à ce qui semble être une action illégale prise par l’administration Trump, empêchant l’entrée aux États-Unis d’un certain nombre d’individus persécutés.
Le premier ministre Trudeau devrait maintenant donner effet à la position du gouvernement en délivrant immédiatement des permis de séjour temporaires à ces réfugiés déplacés, y compris les Syriens, estimés entre 300 et 500 individus. Le Canada devrait également envisager de suspendre sa participation à l’Entente entre le Canada et les États-Unis sur les tiers pays sûrs, qui mandate les gouvernements des deux pays de partager la responsabilité de protéger les réfugiés qui arrivent à leurs frontières. Si les États-Unis refusent l’accès aux réfugiés approuvés et examinés, cela est sans doute une violation à l’entente de 2004. Il est peu probable que le Canada adopte cette position puisqu’il tente de minimiser l’effet des mesures ultérieures que l’administration Trump envisage d’invoquer, y compris la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). Les États-Unis sont le plus important partenaire commercial du Canada.
Les dernières politiques peignent les États-Unis comme anti-islamiques. Les seules personnes qui célèbrent ces politiques perverses sont les extrémistes, les individus mêmes que Trump tente d’empêcher d’entrer au pays. Les alliés des États-Unis en Europe ont exprimé leur opposition unanime à ces politiques. Le Canada est maintenant en mesure de mener un rejet concerté en donnant immédiatement accès à toutes les personnes déplacées, et pas seulement au nombre minimal échoué à la frontière entre le Canada et les États-Unis. Malheureusement, il s’agit d’un résultat peu probable.